I
À cette époque, les vertus de tolérances avaient complètements disparues et la cruauté du prince était désormais devenue légendaire. Néanmoins, bien que le prince fit évidemment fausse route en gouvernant de la sorte, l’énergie allait remontant à la source, c’est-à-dire au prince pour violemment s’inverser dans des événements sauvages dont le prince se souviendrait longtemps après sa mort… Les emblèmes de l’époque, le monde adulte, ou ce qui serait bon de nommer la société établie étaient le superflu et l’apparence, mais érigés aux rangs de perfections et d’obligations! Les dégâts causés par ces soi-disantes « vertus » ont étés plus que considérables et il conviendrait d’ériger de nouveaux tribunaux pour de nouvelles peines mais l’arbitraire de la justice humaine est comme une flamme hésitante, prête à s’enflammer à n’importe quel instant, prête à s’éteindre aux moindres coups de vent. La justice à cette époque était biaisée. Et la violence que subissait les jeunes était terrible. Il fallait du courage pour se frayer un chemin à travers ce monde étrange vendu par les publicités et autres manigances de ce que beaucoup appellent le Système. Le prince était fier à l’époque, il ne s’était pas encore encastré dans une voiture, se voyant projeté à terre violemment, le prince ne savait pas encore quel sort lui était réservé lui qui pensait détenir les clefs de la bienséance et des bonnes coutumes! À l’horreur de cette justice et aux déviations immondes que le genre humains a connus, bien sûr seules les véritables vertus seront salutaires, à dire l’innocence et l’ouverture, la générosité et la tolérance quand on sait que tout concourt à avancer dans une seule et unique direction, hormis les crimes et les vols, la vie se charge de punir ce qui doit être puni pour le reste la seule éducation possible réside dans la tolérance.
II
Je suis encore dans le Palais. Récemment, j’ai échappé au pouvoir corrupteur du Prince, à son air vicié et ses faux-semblants. Sous couvert de vouloir me protéger, il m’écrasait perpétuellement pour assouvir sa soif de vengeance, son avidité pour le sang et le désespoir.
Maintenant que le Prince n’a plus prise sur mes faits et gestes - bien que je sois toujours là rôdant dans son Palais - car son esprit a changé, il vire au tourment esseulé… désormais il n’a plus de prises sur moi. Je le vois seul dans les grandes salles de son Palais, le visage triste et comme inanimé. Aucunes compassions ne me traversent pour cet être malveillant. Et pourtant je ne lui souhaite aucun mal. Je me désintéresse tout simplement de lui. Au fond il n’a eu que ce qu’il mérite. Maintenant que je ne suis plus dans les douves, j’erre libre dans les antichambres vides de l’aile droite. Quand le Prince me voit passer, c’est à peine si un sourire lui effleure le visage, il est Ailleurs et cet Ailleurs ne me regarde plus. Je n’ai aucunes affaires à moi dans ce Palais. Demain à la première heure, à l’aube naissante, je quitterai le Palais, plein d’entrain pour aller découvrir le monde. Je n’emporterai rien d’autre que mes vêtements et mon enthousiasme, laissant le Prince à ses occupations, j’irai creuser la joie dans ce monde. Je connais quelques chemins intéressants au delà du Jardin qui me permettront d’arriver en quelques jours au cœur de la Grande Ville et d’aller à la rencontre des multiples aventures qu’elles prodiguent.
III
J’ai quitté le Palais depuis maintenant deux jours. Je vois encore les reflets de lumières du Palais au loin. Mais bientôt il disparaîtra complètement. Ça fait deux jours maintenant que je marche, seul le long de la route. Le temps n’est pas défavorable, on est aux beaux mois, juin approche et mai tire sur sa fin. Je me souviens d’avoir connu il y a quelques temps un forgeron logé en plein cœur de la Grande Ville. C’est vers lui que je me dirigerai instinctivement pour me former et pour me guider dans cette voie tortueuse et magnifique dans laquelle je m’engage. Je me souviens aussi que cet homme que j’avais rencontré avant d’être séquestré au Palais par le Prince était d’une étonnante vigueur. Tous les coups que la vie lui portaient semblaient étrangement le renforcer. Il allait de l’avant avec une surprenante habilité. À cette époque, lui et moi, nous nous entendions bien. Il m’avait pris sous son aile alors que j’avais quitté mes parents. J’étais âgé de 14 ans tout au plus. Que sont devenus mes parents ? Sont-ils encore en vie ? J’irai à leur maison une fois arrivé à la Grande Ville mais après avoir vu le Forgeron. Il m’avait pris sous son aile et me formait alors. J’étais apprenti dans sa Corporation et promu à un avenir lumineux et paisible mais les événements de l’époque en ont décidés autrement. L’emprise du Prince devenait de plus en plus grande et il sévissait dans la Ville, arrachant des adolescents contre leur gré de leur famille. Ma mémoire est jonchée d’événements sanglants, de cris et de violences insoutenables. On ne pouvait rien faire contre le Prince à ce moment. Les choses ont changés, maintenant qu’il est seul et faible, le sort jouera en sa défaveur, je ne sais pas encore comment.
IV
Alors que je marchais le long d’un sentier magnifique à des hauteurs complètement disproportionnées. Le Château du Prince était loin. Je l’avais quitté depuis longtemps. Un événement considérable advint. Le Ciel d’un bleu magnifique tourna à l’orage et le château de mon esprit tomba comme du sable. Toutes les constructions passées et non viables se détériorèrent d’elles-mêmes ne laissant à leur place qu’une fine couche de sérénité. Un calme s’infusa alors en moi et les pertes de mon esprit n’étaient en réalité pas des pertes. Au loin je voyais le Prince s’agiter dans des fureurs vaines, désormais la paix qui s’installa en moi était lointaine de ces vacarmes désordonnés. L’orage commençait à passer et le bleu pointait à nouveau le bout de son nez, là-haut, dans le Ciel.